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Avec « Rendez-vous avec la mort », le passé retrouvé d’un dissident tchèque

La photocopie du manuscrit, en tchèque, est posée sur la table du salon de l’appartement parisien de l’ancien professeur de mathématiques aujourd’hui à la retraite Michel London, 74 ans. C’est lui qui a assuré la traduction de l’unique ouvrage signé Salomon Ickovic, publié aux éditions Flammarion le 16 octobre. Son titre : Rendez-vous avec la mort. La découverte de ce récit autobiographique a été, pour Michel London, un autre type de rendez-vous ; elle lui a donné l’occasion de remonter son histoire familiale, de lever le voile sur les destins communs de ces hommes, dont son père, qui, au siècle dernier, payèrent un lourd tribut pour avoir résisté aux totalitarismes.
Né à Prague en 1950, Michel London est l’un des trois enfants de celui qui restera jusqu’à sa mort, en 1986, l’une des figures les plus emblématiques de la dissidence communiste, Artur London. Un an après sa naissance, son père, alors vice-ministre des affaires étrangères du régime communiste tchécoslovaque, est arrêté. Il appartient au groupe des quatorze accusés du fameux procès de Prague de 1952, auxquels on arrache des aveux fabriqués de toutes pièces pour « conspiration contre l’Etat ».
Seuls trois « accusés » échappent à la peine capitale, dont Artur London, qui, après avoir connu la prison, trouve refuge en France en 1963. Cinq ans plus tard, il signe L’Aveu, récit autobiographique qui dévoile le mécanisme qui a permis de broyer les militants du mouvement révolutionnaire avec ce procès stalinien organisé au pays de Kafka. Il sera adapté au cinéma en 1970 par Costa-Gavras, avec Yves Montand dans le rôle du vice-ministre tchèque.
C’est à l’occasion d’un voyage à Prague, en avril 2022, que Michel London va découvrir cet autre manuscrit, écrit par un ami de son père, Salomon Ickovic, faisant écho à L’Aveu. La fille de cet ancien dissident, Régine Ickovicova, lui en dévoile l’existence. « J’ignorais que son père avait écrit quelque chose. Elle m’a raconté pourquoi elle n’en possédait qu’une photocopie, l’original ayant été perdu. »
En 1968, Régine Ickovicova était étudiante à Prague au moment de l’occupation du pays par les troupes du pacte de Varsovie. Multilingue et collaboratrice des correspondants français de télévision, elle avait senti la nasse se refermer sur elle et avait préféré s’exiler en Italie en laissant sa famille dernière elle. Elle n’a jamais revu son père, mort en 1971. C’est à son retour d’exil, en 1989, après la chute du mur de Berlin et la dissolution de l’empire soviétique, que Régine Ickovicova se voit confier par sa sœur une photocopie du manuscrit.
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